Le blog d’Audrey: Se préparer pour la reprise des compétitions
Ce blog est écrit par Audrey Adiceom. Elle nous donne un aperçu de sa vie d’archère d’élite au sein de l’équipe de France de tir à l’arc.
Je suis restée confinée chez Jean-Charles Valladont et son amie Laetitia pendant un peu plus de trois mois.
Cet environnement m’a permis de m’entraîner à mon propre rythme, ce qui m’a aidé à retrouver le plaisir simple de la pratique. Nous nous motivions ensemble pour faire du sport presque tous les jours. J’ai pu garder le cap physiquement même si j’avais réduit mon volume de flèches tirées par semaine.
Cette pause dans nos vies fut une vraie expérience humaine. J’en profite pour remercier nos hôtes de leur accueil et l’ensemble du groupe pour les supers souvenirs que nous avons partagés ensemble.
À mon retour à l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (INSEP) à Paris le 30 juin, j’étais partagée entre plusieurs sentiments: l’excitation de retrouver mes amis de l’INSEP, l’appréhension de retourner dans un système cadré, l’angoisse de revenir dans une grande ville comme Paris et la curiosité de voir comment la reprise allait se passer.
Mes doutes se sont dissipés dès mon premier entraînement.
J’ai beaucoup apprécié de retrouver le groupe et les situations collectives. J’ai retrouvé petit à petit la bonne dynamique et l’implication requise pour la pratique du tir à l’arc à haut niveau. Revoir mes amis de l’INSEP était aussi très ressourçant. Nous avons un collectif très sympa et j’ai vraiment l’impression qu’on se tire vers le haut.
L’INSEP a mis en place un système efficace pour l’entraînement dans un monde post-pandémie. Nous avons des rendez-vous médicaux et psychologiques pour évaluer nos capacités physiques, nos réflexes et notre santé mentale. Les endroits clos sont fléchés et il y a partout des gels hydroalcooliques ainsi que des produits de nettoyage de surface.
Dans le cadre des gestes barrières et des mesures de sécurité sanitaires, chaque archer tire sur sa propre cible et porte un masque lorsqu’il va chercher ses flèches. L’INSEP suit le protocole du port de masque imposé dans tout Paris, et nous en portons à tout moment, sauf pendant le tir.
Il y a suffisamment d’espace entre nous pour que tout le monde soit en sécurité. A la fin de chaque passage, nous appliquons un désinfectant et nous essuyons tout.
Un des moments que je craignais était le retour que me ferait mon entraîneur sur mon tir. Il était en effet presque certain que ma technique s’était dégradée pendant la pause. Pas énormément, mais assez pour rendre mon tir moins solide et moins précis. J’avais donc un bon axe de travail pour la suite.
Je savais au fond qu’une diminution de l’entraînement impliquerait une baisse de la qualité globale de mon tir. C’est la nature même de ce sport.
Mais je ne regrette pas du tout mes choix au cours des trois mois de confinement. Je sais ce qu’il me reste à travailler, et j’ai déjà bien progressé ces dernières semaines.
Tirer avec d’autres archers nécessite un ajustement. Je ne suis plus seule avec ma flèche. J’entends le clic des autres et les consignes des coachs aux autres archers. Je reçois moi aussi des indications de mon entraîneur. La confrontation directe avec les autres alimente fortement mon esprit de compétition qui s’était un peu évaporé.
Depuis mon retour à Paris, mes résultats sur ces types de séances se sont améliorés globalement. Les jours où je suis en dessous sont causés par mes propres lacunes ou souvent aussi par la météo changeante. Nous avons la chance d’avoir un super terrain à l’INSEP, avec la possibilité de s’entraîner de l’intérieur vers l’extérieur s’il fait trop froid où depuis l’extérieur avec un abri s’il pleut.
Lorsque la météo est mauvaise, je m’assure de rester exigeante et rigoureuse sur mon tir. Ce n’est pas parce qu’il fait moins beau que je dois faire de mauvaises performances. Je dois être capable d’avoir un bon niveau même quand les conditions ne sont pas idéales.
En même temps, je m’efforce d’être tolérante avec moi-même, en acceptant les erreurs et en ne me blâmant pas à chaque faux pas. C’est ainsi que je travaille mes outils mentaux et valide mes acquis techniques.
La semaine parfaite n’existe pas. Mes besoins et le travail à effectuer pour être performante peuvent varier d’une semaine à l’autre, légèrement certes car cela reste un sport de répétition, mais cela peut changer quand même.
la proportion de tir sur paille, de tir sur cible, de recherche de performance, le volume global hebdomadaire, le nombre de fois où je vois ma préparatrice mentale ou ma psychologue, mon temps de repos entre deux séances, et le temps que j’ai pour moi notamment pour travailler sur mon stage.
C’est pourquoi il est important pour moi de prendre le temps de réfléchir avec mon entraîneur. Que vais-je faire cette semaine et pourquoi? Qu’est-ce qui a bien ou mal fonctionné la semaine dernière? Qu’est-ce que j’ai envie de travailler et dans quelle quantité?
Cet été, j’ai participé à trois compétitions en ligne.
Cet été, j’ai participé à trois compétitions en ligne. J’ai réalisé 653 points et 649 points au challenge FFTA, me classant respectivement troisième et quatrième; puis, au challenge de Saint Avertin, je me suis classée cinquième en qualifications avec 664 points, prenant la quatrième place après les matchs suite à une défaite contre Florent Mulot. Enfin, j’ai fait quatrième des qualifications au tournoi virtuel d’Antalya avec 1306 points, avant de m’incliner en quart de finale face à Vanessa Landi.
J’ai ensuite participé à une compétition réelle à l’INSEP le 2 septembre organisée pour les membres du Pôle de Tir à l’arc, où j’ai terminé première avec 658 points et 657 points.
C’était notre première vraie compétition depuis février 2020 et nos sélections nationales, un sacré bout de temps!
J’ai réussi à reprendre mon endurance physique petit à petit au niveau de la charge d’entrainement. Je ne me sens pas au summum de ma forme mais je suis sur la bonne voie. Mon tir et mes performances eux aussi évoluent dans la bonne direction, c’est très encourageant.
J’ai besoin de retrouver la forme, car c’est de là que je puise ma motivation à m’entraîner. Avant la pandémie, ma motivation pour l’entraînement était fortement liée à mon désir de progresser sur la scène internationale et à l’envie de m’exprimer à mon meilleur niveau au bon moment.
Depuis que je suis en équipe de France, la saison extérieure rythme ma programmation et mes objectifs.
En pleine saison, nous sommes tout le temps en déplacement pour une compétition, un stage, un championnat. C’est un rythme assez soutenu, mais je l’apprécie, car c’est là tout le charme du sport de haut niveau.
Aujourd’hui, nous vivons tous une période floue et assez particulière. Même si l’espoir de la reprise des compétitions internationales reste lointain, je ne peux pas abandonner. Je préfère profiter de cette période pour travailler sur mes faiblesses techniques, mentales et physiques, et travailler encore plus pour consolider mes points forts.
À moins d’un an des Tokyo 2020 Olympic Games (reportés en 2021), et à moins de quatre ans de ceux de Paris 2024, mon objectif aujourd’hui est d’accumuler un maximum de bonnes expériences à l’entraînement.
Je veux être prête quand tout recommencera.
Images avec l’aimable autorisation de Audrey Adiceom.