Jean-Charles Valladont: une vie de Jeux
ATHLETE SPOTLIGHT est présenté par WIAWIS.
“Je dois mettre ma flèche au milieu.”
Pour Jean-Charles Valladont, leader de l’Équipe de France, l’un des plus beaux palmarès de l’archerie française, tout se résume à ça.
Alors qu’il prépare les quatrièmes Jeux de sa carrière, le natif du Doubs, médaillé d’argent à Rio en 2016, garde un amour simple, pur pour sa discipline. Et une compétitivité intacte.
Pas question pour lui de s’éparpiller, de succomber aux émotions décuplées par la symbolique d’une Olympiade célébrée à la maison. Dans l’esprit de Jean-Charles Valladont, Paris 2024, c’est une mission: celle d’apporter aux Français une nouvelle médaille olympique.
Pourtant, il y aurait de quoi se laisser griser. Les Jeux Olympiques sont pour lui et sa famille une passion de toujours.
En 1996, pour les Jeux d’Atlanta, aux États-Unis, Jean-Charles a sept ans. Il se souvient encore aujourd’hui des épreuves regardées à la télé. De son père, hurlant sur le canapé pour accompagner les exploits de la sprinteuse Marie-José Pérec, double-médaillée d’or cet été-là au 200 et 400m.
“J’ai vu l’émotion que provoquait, au sein de ma famille, de mon cocon proche, une réussite sportive de la nation,” confie-t-il. “Là, je me suis dit: ‘Si je fais du sport, peut-être que j’y arriverai aussi.’”
Dès petit, Valladont aimait le sport. Il en a d’ailleurs expérimenté plusieurs: handball, football, l’escalade… Avant de découvrir le tir à l’arc, un sport en adéquation avec ses goûts.
“Il n’y pas une grande intensité brève – je ne me serais jamais vu faire du 100m!”
“La performance sportive se situe plutôt dans le fait de commencer le matin à 8h, terminer à 18h, être éprouvé autant psychologiquement que physiquement. Et j’en avais la capacité.”
Entré, à l’adolescence, au Pôle régional de Dijon, il commence à comprendre l’ampleur du sport de haut niveau. À comprendre, aussi, ce qu’est l’Olympisme pour un sportif, en voyant des photos de Sebastien Flute, médaillé d’or en 1992 à Barcelone.
Puis viennent Nancy, le Pôle France, et l’INSEP (Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance), qui a formé certains des plus grands sportifs Français. Dont nombre de médaillés olympiques. Tout cela le mène à une qualification pour les Jeux de Pékin, en 2008. Une consécration.
Émerveillé par ses premiers Jeux, par les Djokovic et autres grands noms du sport qu’il côtoie dans la village olympique, le jeune Jean-Charles n’obtient pas les résultats qu’il espérait.
En 2012, une blessure à l’épaule le prive des Jeux de Londres. Alors, en 2016, à Rio de Janeiro, il veut mettre toutes les chances de son côté.
Son approche est différente: il est là pour gagner. Tout le reste n’est que folklore.
Après une huitième place en qualifications, la suite s’écrit en lettres majuscules. Le quart de finale remporté en barrage face à l’Italien Mauro Nespoli, la demie contre Sjef Van Den Berg, puis la médaille d’argent qui efface la déception d’une finale remportée par le Coréen Ku Bonchan.
Cette médaille lui donne de la confiance durant la saison suivante, auréolée de l’or en individuel et de l’argent en double mixte sur l’étape de Coupe du Monde Hyundai d’Antalya, en 2017.
Ensuite… des hauts et des bas, comme il le dit lui-même. Son entraîneur quitte ses fonctions, des changements ont lieu à la Fédération française. Valladont a du mal à retrouver son niveau de Rio.
Les Jeux de Tokyo, en 2021, confirment cette tendance. Sorti au premier tour de la phase éliminatoire, le meilleur résultat du Français est un huitième de finale en double mixte, aux côté de Lisa Barbelin.
Mais Jean-Charles l’affirme: il n’a “jamais lâché le morceau”. Alors, lorsque le Coréen Oh Seon Tek prend les rênes de l’équipe de France en 2022, il saisit l’opportunité de se réinventer.
“J’ai pris ça pleinement,” raconte-t-il. “En me disant que ça ne pourrait m’apporter que du bien.”
Le travail paie. Valladont retrouve de la consistance, de la régularité dans ses performances. Il renoue avec le podium en Coupe du Monde Hyundai, à Antalya (encore), l’an passé, avec une belle médaille d’argent.
Septième des Jeux Européens en Pologne, huitième de l’étape parisienne de la Coupe du Monde, il se concentre sur son chemin, sur ses objectifs. Au bout: les Jeux de Paris 2024.
“Toute mon expérience au haut niveau, analyse-t-il, les différents résultats, les hauts, les bas, le positif, le négatif : je suis sur une année où j’essaie de prendre tout ça pour en faire un concentré performant.“
L’actuel numéro 13 mondial sait qu’à Paris, la fête sera belle. Que cette expérience, concourir lors des Jeux Olympiques dans son propre pays, est celle d’une vie.
Pourtant, c’est autre chose qu’il a en tête. Au-delà de la symbolique, ce qu’il veut, c’est une médaille. Son parcours, sa carrière, sa vie de Jeux, tout semble l’avoir mené à cela.
“Je sais que si je veux me donner les moyens de remplir cet objectif, il ne faut pas que je me laisse émerveiller, comme à Pékin. Il ne faut pas se tromper de cible.“
“Est-ce que l’objectif c’est de s’amuser et profiter de l’émerveillement? Ou est-ce que c’est d’abord réussir ses Jeux, et après, s’émerveiller? Je pense qu’on ne peut pas mélanger les deux.“
Faire abstraction des émotions fortes suscitées par ces Jeux, telle est la mission que s’est confié Valladont. Pour réitérer sa performance de 2016. Pour, aussi, laisser à ses proches le loisir de s’émouvoir. Comme à Rio.
“Mes parents étaient là, sur place, au Sambodromo,“ se souvient-il. “L’émotion que procuraient ceux qu’on voyait à la télé quand j’étais petit, cette fois c’était moi qui avais réussi à le procurer à mes proches, ma famille et mon pays.“
“C’est le plus gros salaire qu’ait jamais reçu le petit archer que je suis: susciter cette joie aux autres.“
Jean-Charles Valladont s’imagine déjà croiser le fer avec les meilleurs archers de la planète, l’été prochain, sur l’esplanade des Invalides. Son focus: la cible. Pour aller tutoyer les sommets.